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Olivier FAURE, Premier secrétaire du Parti Socialiste français, a publié en Novembre 2023 un ouvrage intitulé "Le Capital Républicain" aux Editions de l'Aube.

(note de lecture rédigée le 5/12/2023 Par Denis Consigny et n'engageant pas l'Association AICU)


Cet ouvrage a le mérite d'aborder les questions  relatives à l'égalité des chances et aux marges de progression très importantes dont dispose la Société Française dans ce domaine. Dans une société où les politiques n'envisagent la lutte contre les inégalités que sous l'angle de l'augmentation des prélèvements sur les revenus des classes moyennes et supérieures pour financer des allocations bénéficiant à celles et ceux qui sont en situation précaire, il est rassurant de lire qu'au moins un élu a compris que les inégalités patrimoniales sont plus prononcées et plus pérennes que les inégalités de revenu et qu'en conséquence il n'est pas interdit de réfléchir à des réformes qui permettraient d'initier un rééquilibrage dans les modalités d'accès au patrimoine.

L'auteur constate que nous vivons dans une héritocratie qui rechigne à se reconnaitre et à se nommer comme telle et qui s'obstine à entretenir le mythe d'une méritocratie justifiant les inégalités de niveau de vie, donc de revenu -ce qui est souvent vrai- et de patrimoine -ce qui l'est beaucoup plus rarement-.

Après quoi Olivier Faure focalise son analyse sur l'éducation.  Il part du constat que la Société s'est organisée pour donner à tous ses enfants le capital de départ le plus précieux qui soit, sous la forme d'une éducation gratuite. Celles et ceux qui suivent un parcours scolaire et universitaire au moins jusqu'à BAC+2  bénéficient d'un équivalent Capital de 244 000 Euros dépensés pour eux sous forme de rémunérations des enseignants et de chauffage des locaux tandis que les enfants de la République dont le cursus d'apprentissage s'interrompt plus tôt (niveau bac) ou précocement (à 16 ans avec ou sans le BEPC) ne consomment qu'une moindre ou faible partie  de la dotation en Capital de Connaissances auquel ils auraient pu avoir droit et que la Société était disposée à leur offrir.

L'auteur démontre, statistiques à l'appui, que les durées des parcours scolaires et universitaires sont directement corrélées aux milieux sociaux donc aux niveaux de vie des élèves. Il en conclut que ce mode de fonctionnement aboutit à un paradoxe redistributif injustifiable: les contribuables des milieux populaires financent par leurs impôts, dont la TVA, des études longues dont leurs enfants ne profitent que très marginalement. En d'autres termes les moins fortunés de nos concitoyens sponsorisent, à chers deniers, les parcours universitaires des enfants des milieux favorisés qui, au cours des décennies à venir, donneront très vraisemblablement des ordres à leurs propres enfants dans les administrations ou dans les entreprises.

Ce constat posé et dénoncé, sa proposition disruptive est la suivante: Verser aux jeunes français qui sont amenés, pour quelle que raison que ce soit, à ne pas consommer l'intégralité du crédit éducatif auquel ils auraient pu avoir droit, une indemnité compensatrice. Cette indemnité pour manque à étudier serait de 15 k€ à 19 ans (Bac+1) de 30 k€ à 18 ans (terminale), de 45 k€ à 17ans (première) et de 60 k€ à 16 ans (brevet ou inférieur). L'ensemble du dispositif couterait environ 8 Md€ par an et aurait vocation à être financé par "un prélèvement sur les transmissions de Capital, que ce soit par voie de succession ou de donation".

Même si on peut déceler dans le mode de financement proposé l'influence du Professeur Piketty (Capital et Idéologie p 1129 à 1133), il est frappant de constater que les Socialistes, depuis qu'ils se sont convertis à l'économie de marché (1983!), ont tendance à rechercher, à tout prix et en toutes circonstances, la maîtrise comptable des dépenses. Pour la santé, cela n'a pas vraiment fonctionné. Pour l'éducation, s'aventurer sur le terrain de la compensation des non-dépenses en posant que le capital culturel pourrait avoir, pour les élèves comme pour la nation tout entière, une contrevaleur égale à son prix de revient qui serait versée pour solde de tous comptes, voilà qui semble pour le moins hasardeux. Même si l'auteur se dit persuadé que la très grande majorité des  élèves seront raisonnables et qu'ils préféreront deux "tu l'auras si tu as la patience et le courage de poursuivre et de mener à leur terme des études longues dans des conditions précaires" à un seul "tiens voilà 60.000 Euros, fais en ce que tu veux" (ou presque, un accompagnement par Pole emploi des projets professionnels est évoqué , dont les modalités ne sont pas précisées).


Difficile de  ne pas trouver dans ce texte une référence implicite au conseil attribué à Confucius : "Si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour;  si tu lui apprends à pêcher, il mangera toute sa vie durant". Un conseil qu'Olivier Faure semble vouloir compléter par:  "et si 'il ne veut pas ou n'as pas le temps d'apprendre à pécher car il estime pour l'instant avoir autre chose à faire, donne lui de quoi s'acheter une barque et des filets, en espérant qu'il saura d'instinct où les jeter et qu'il évitera de sortir par gros temps".


Ce qui est  proposé dans "Le Capital Républicain" ne recoupe que marginalement les thèmes défendus par l'Association AICU qui cherche à apporter une réponse concrète aux revendications des gilets jaunes (règle 85-A) comme à celles des jeunes des territoires perdus de la République. Tout en remerciant Monsieur Olivier Faure d'avoir eu le courage d'aborder un sujet connexe sous le prisme de l'éducation, le bureau de l'Association AICU se tient à sa disposition et à celle de ses équipes pour leur fournir des exemplaires de "Un Capital, réponse à Karl Marx" de Bernard Berteloot et pour échanger avec eux au sujet d'une éminemment souhaitable réécriture de l'article 17 de la DDHC qui ne se contenterait plus de sacraliser la propriété mais permettrait aux jeunes français d'y accéder plus tôt et plus facilement, et, partant, d'entrer dans la carrière sans attendre que leurs anciens n'y soient plus. Etant ici précisé que ce capital financier a vocation non pas à se substituer mais bien à s'ajouter à l'indispensable et précieux capital culturel qui représente, depuis Jules Ferry, la meilleure et la plus belle façon qu'a la République de faire comprendre à ses enfants qu'elle s'efforce "d'élargir l'esprit de famille à la Société tout entière".





Une proposition de texte destiné à être éventuellement publié sur le site : Pourunecause.fr ( une plateforme et des engagements pour faire avancer les combats des Français ouverte depuis le 7 avril 2021) -

(texte mis en ligne le 10/05/2021)

selon ce site : "Le mouvement En Marche ! lance une grande mobilisation avec la plateforme Pourunecause.fr. Cette plateforme d’engagement permet à chaque citoyen de porter une cause qui lui est chère, de la faire entrer dans le débat public, d’interpeller les responsables politiques concernés et de changer le réel. En marche ! s’engage à accompagner les citoyens en leur donnant les moyens de faire grandir et réaliser leurs cause".


Les membres du bureau de l'Association AICU sont perplexes vis à de l'intérêt et même de la sincérité de cette plateforme. Cela dit, après avoir consulté une partie des 900 propositions mises en ligne, nous considérons qu'une parution sur cette plateforme peut a minima contribuer à faire connaître la cause "Capital Universel  sous forme d'avance sur héritage" et nous n'avons pas d'objection à ce que ce concept soit relayé ou même récupéré par quelle qu'organisation politique non-extrémiste que ce soit. Préalablement à cette éventuelle parution, un premier jet est proposé ci-dessous, dans le but de recueillir d'éventuels commentaires, suggestions ou objections que nous vous remercions d'adresser par mail à : dc@aicu.fr



Confier à chaque française et à chaque français qui le souhaite un Capital sous forme d’avance sur héritage pour faciliter les parcours de vie et pour fluidifier la vie économique et sociale.

L’idée est ancienne. Elle remonte à Aristote (concept de justice distributive préalable à la justice arbitrale et à la justice punitive) et a été reprise notamment par Thomas Paine à l’époque de la révolution. Elle est aujourd’hui défendue aux USA par Bruce Ackermann et en Europe par Bernard Berteloot ainsi que par l’Association Intergénérations pour le Capital Universel. www.aicu.fr.


Appliquée à la France des années 2020, cette idée pourrait vraiment et durablement changer la donne, sans nécessiter aucune dépense donc aucun prélèvement ni aucun endettement supplémentaire de la part de la puissance publique.


Le constat de départ est que les inégalités patrimoniales sont beaucoup plus importantes et nettement plus pérennes que les inégalités salariales. Même si elles sont peu diffusées, les courbes de Lorenz en sont une démonstration irréfutable. Pour qui s’attache à faire progresser l’égalité des chances (ce qui est un objectif plus réaliste que la recherche de l’inaccessible et potentiellement sclérosante égalité tout court) la meilleure stratégie consiste à confier à chaque citoyen qui en fera la demande sa quote-part de l’héritage commun sous la forme d’un pécule qu’il restituera à la collectivité soit lorsqu’il héritera soit, à défaut, après son décès.


Une bonne façon de procéder consisterait à calculer à proportion de son espérance de vie statistique résiduelle la quote-part du capital commun que chaque citoyenne et chaque citoyen pourra mobiliser pour réaliser son insertion dans la société et sécuriser son projet de vie. L’espérance de vie statistique étant de 85 années, une formule équitable serait, pour tout citoyen français âgé d’au moins 25 ans : C = (85 – Age) X 1000. Ce qui revient à dire que chaque française ou chaque français qui le désire peut mobiliser 60.000 € s’il a 25 ans, 45.000 € s’il a 40 ans et 5.000 € s’il est âgé de 80 années. Bien entendu il ne s’agirait ni de dons ni de subventions mais simplement d’argent confié destiné à être investi par exemple dans un premier logement ou un fonds de commerce. Ces sommes, actualisées, seront restituées à la collectivité soit lorsque le bénéficiaire percevra un héritage venant de sa famille soit au moment de son décès (elles seront alors retranchées de ce qu’il léguera à sa descendance). Ainsi, cette injection massive de capitaux dans la vie économique réelle ne coûtera absolument rien à la puissance publique, même s’il conviendra de provisionner le cautionnement des inévitables défaillances qui pourront survenir dans plusieurs décennies.


Clairement, les bénéfices attendus en termes de redynamisation par la demande des marchés, dont celui du logement, au niveau des créations d’entreprises et d’activités et, surtout, pour ce qui concerne l’insertion des jeunes qui pourront "entrer dans la carrière sans attendre que leurs anciens n’y soient plus" et pour ce qui est d’un retour à une paix sociale durable via une réponse concrète aux revendications de gilets jaunes sont hors de proportion avec le risque représenté par les quelques appels de caution dont on peut estimer qu’ils représenteront moins de Cinq pour cent des encours à un horizon lointain.


Les raisons pour lesquelles cette proposition n’a que très peu de chances d’être étudiée puis retenue sont malheureusement solides et multiples :


-     En premier lieu, les personnes qui, dans l’univers politique comme dans les médias, sont en position de décider de ce dont il convient de débattre se trouvent très majoritairement placées du côté confortable de la fracture patrimoniale : elles appartiennent à des familles dans lesquelles les donations entre vifs et les héritages représentent des montants significatifs. Dans ces conditions, ces personnes n’ont aucun intérêt (sauf volonté de conjurer le risque d’une explosion sociale ?) à saper les fondements du plus discret et du plus exorbitant de leurs privilèges, alors même que ce dernier ne fait pas débat.


-     Ensuite, cette réforme aboutirait à introduire de très importantes quantités d’argent légal et traçable dans les territoires perdus de la République, ce qui troublerait un désordre établi dont la Société française fait plus que s’accommoder. Elle permettrait de plus une émancipation réelle de toute une catégorie de la population, dont des jeunes, des femmes et des prolétaires (au sens marxien de « ceux qui dépendent exclusivement de leur force de travail pour survivre ») qui remettrait en question nombre des équilibres actuels, faits de compromis quand ce n’est pas de compromissions.


-     Enfin l’idée de Capital Universel a été décrédibilisée et même dévoyée, dans l’intelligentsia française sinon dans l’opinion publique, par les travaux récents de Monsieur Thomas Piketty, un brillant universitaire jouissant d’une forte notoriété qui a publié à son propos plusieurs erreurs de raisonnement dans son dernier opus (Capital et Idéologie, Editions Seuil 2019). Cet auteur propose en effet de verser une Dotation Universelle d’un montant de 120.000 € à chaque jeune français atteignant l’âge de 25 ans et de financer cette énorme dépense (environ 96 Milliards d’Euros par an) par une fiscalité délirante (90% pour les tranches les plus élevées) frappant et les patrimoines et les successions. En ignorant que le mécanisme d’avance d’hoirie représente la seule solution permettant d’habiller Pierre (=les jeunes) sans déshabiller Paul (= les détenteurs de patrimoines), en proposant une dotation d’un montant très élevé qui créerait inévitablement un sentiment d’injustice et de discrimination dans l’esprit des « nés-trop-tôt-pour-en-bénéficier », donc une fracture sociale liée à l’âge, et en suggérant un matraquage fiscal des patrimoines et des successions d’une sévérité telle qu’elle ferait fuir les capitaux et leurs détenteurs bien plus efficacement que le rétablissement de l’ISF ou qu’une victoire de l’extrême gauche aux élections présidentielles, Monsieur Piketty a réussi à faire passer le concept de Capital Universel au rang d’utopie hautement fantaisiste qui n’a définitivement aucune chance de se concrétiser. D’autres personnalités médiatisées ont malheureusement contribué à discréditer le concept de Capital Universel, sans que l’on puisse savoir s’ils l’ont fait par ignorance du sujet ou par malveillance à son égard.


- Et malheureusement, d'autres auteurs ont contribué à alimenter la confusion autour de ce concept. Citons par exemple Monsieur Benjamin Griveaux qui a proposé, lors de sa brève participation à la campagne municipale à Paris en 2020, un prêt de 100.000 € moyennant un abusus limité en faveur de certains candidats à l’achat de logements dans la Capitale (une manne qui aurait été captée par les vendeurs et un statut du bien incompatible avec les actuelles règles de droit) ou encore Monsieur Stanislas Guerini qui a suggéré au début de cette année 2021 que les jeunes de 18 à 25 ans pourraient bénéficier d’un prêt à taux faible ou nul d’un montant de 10.000 € remboursable à longue échéance et si et seulement si leurs revenus venaient à dépasser un certain seuil (1.800 € mensuels: pour ne pas devoir rembourser il suffit de "rater" sa vie, au moins du point de vue des critères de l'économie libérale !!!). Le Capital Universel étant un vrai sujet, il est rassurant de voir des responsables politiques l’évoquer. Souhaitons simplement que, tirant les leçons des conséquences délétères des approximations de Monsieur Benoit Hamon à propos du Revenu Universel lors de la campagne présidentielle de 2017, ces personnalités prennent le temps et la peine de s’informer sur le sujet ce qui leur permettra de l’aborder sans le saborder.


Dans ces conditions, c’est sans aucune illusion que je présente sur cette plateforme, es-qualité de président et animateur de l’Association Intergénérations pour le Capital Universel, cette cause plus amplement décrite sur le site https://aicu.fr. Mon analyse est que, même si cela ne modifierait en rien leur niveau de richesse absolue, le Capital Universel ne sera pas généreusement octroyé par les détenteurs de patrimoine à celles et ceux qui dépendent actuellement de la seule vente de leur force de travail ou des aides sociales pour survivre. Rien n’a changé depuis le début du XXème siècle, quand Auguste Detoeuf écrivait « Le Capital, c’est du travail accumulé ; simplement, comme on ne peut pas tout faire, ce sont les uns qui travaillent et les autres qui accumulent ». A tel point qu’un rapport de l’OCDE publié en 2018 a montré qu’il fallait en France 6 générations (180 ans) à une lignée pour passer de l’état d’extrême pauvreté au revenu médian.


Je reste persuadé que l’instauration du Capital Universel par avance d’hoirie représente l’une des évolutions sociales les plus importantes et les plus fécondes que l’on puisse actuellement proposer dans le cadre d’un nouveau contrat social que beaucoup, devant le constat des limites de l’actuel qui n’a pratiquement pas connu d’évolution notable depuis l’instauration des congés payés, appellent de leurs vœux. Simplement, je me pose la question de savoir si cette réforme dont le rapport bénéfices/risques est sans équivalent ne devra pas résulter de mouvements revendicatifs initiés par celles et ceux dont elle peut sécuriser les parcours de vie. En effet, les décideurs, parmi lesquels la plupart des censeurs potentiels de la présente note, ont peu de chances d’en saisir ni l’intérêt ni la portée, installés qu’ils sont dans le confort que leur procure l’appartenance à une lignée familiale pour laquelle l’état d’extrême pauvreté ne représente ni un souvenir, ni une perspective.


     Un  nouvel article de Julien Damon publié le 6 mai 2021 sur les Echos


https://www.lesechos.fr/idees-debats/livres/quest-ce-que-le-progressisme-aujourdhui-1313130


  • Qu'est-ce que le progressisme aujourd'hui ? recension du livre de  Minouche Shafik , "salué notamment par Christine Lagarde et Ursula von der Leyen, qui constitue une sorte de bréviaire du progressisme contemporain. Il s'agit d'une actualisation du projet social-démocrate, déclinable pour l'ensemble des pays du globe. En matière éducative, dans une logique de prédistribution, elle soutient le schéma d'une dotation en capital ou d'un prêt bonifié de quelques dizaines de milliers d'euros (dans les pays riches) afin que les jeunes puissent envisager l'avenir autrement".




                                                                                         10 / 01 / 2021 : Une proposition de loi « d’aide à l’émancipation des jeunes »


Guillaume Mathelier, élu local, et Alain Policar, chercheur en sciences politiques, proposent dans une tribune au «Monde» publiée le 10/ 01 /2021 de verser le revenu d’existence dès la naissance, dont l’épargne formerait à 18 ans une dotation en capital pour rétablir « l’égalité des dotations initiales »


Depuis quelques années, le débat sur le revenu d’existence, revenu de base ou revenu universel, s’est installé dans le paysage politique et philosophique. L’idée fait son chemin sans encore faire l’unanimité. L’un des arguments principaux est qu’un tel revenu inconditionnel serait non seulement une réponse possible à la raréfaction de l’emploi, mais sortirait également les sources de revenus de la seule sphère salariale.


En ce sens, il ne serait en rien antinomique au travail (contrairement à ce qu’affirment ses adversaires), mais il permettrait d’assurer des ressources en dehors de l’emploi salarié. Il deviendrait un socle inaliénable, un droit lié à la naissance, qui répondrait à la question essentielle de la dignité des êtres humains, de manière universelle et inconditionnelle.


Cependant, des propositions « sœurs » se retrouvent parfois dans le débat et sont souvent mises en concurrence avec l’idée de revenu d’existence. Nous pourrions résumer ces propositions par le terme de « dotation en capital ». Les chercheurs américains Bruce Ackerman et Anne Alstott ont proposé de donner à 21 ans une dotation universelle de 80 000 dollars avec des mécanismes d’accompagnement pour que cet argent puisse être utilisé de manière éclairée et responsable.


Rééquilibrer le rapport entre capital et travail


A l’heure où la jeunesse a besoin de retrouver un horizon dans les multiples crises qui touchent notre société, il est temps de se poser les bonnes questions pour penser différemment la justice sociale. Une proposition de loi est actuellement en discussion et en coconstruction avec les citoyens sur la plate-forme Parlement et citoyens. Cette proposition de loi « d’aide à l’émancipation des jeunes, fondée sur l’attribution d’un revenu de base et d’une dotation universelle dès 18 ans » nous donne l’occasion de faire le point et d’avancer notre proposition philosophique : combiner revenu d’existence et capital d’émancipation.

La proximité avec le revenu d’existence est en partie assumée par le fait que l’individu bénéficiaire pourrait tout à fait utiliser sa dotation en capital pour la transformer à sa guise en revenu mensuel plutôt que de l’injecter dans la consommation ou l’investissement pour un projet (création d’entreprise, voyages, formation, etc.).


Le sociologue américain Erik Olin Wright (1947-2019) a posé la question de savoir quel dispositif entre revenu d’existence et dotation en capital (« dotation d’enjeu ») était le mieux à même de répondre à l’autonomie des individus. Cette analyse donnait sa faveur au revenu d’existence, notamment en raison de sa périodicité. Le revenu d’existence apparaîtrait, selon Wright, davantage en mesure de rééquilibrer le rapport entre capital et travail.


Emancipation de l’individu


L’économiste Coralie Perez a dressé, quant à elle, un panorama des « dotations en capital pour les jeunes », où elle tente de prendre en considération les expériences comme le Child Trust Fund au Royaume-Uni, ou les comptes individuels de formation qu’elle range dans cette catégorie des dotations en capital.


Mais avant de se poser la question du mécanisme distributif, il est nécessaire de connaître le principe qui guidera philosophiquement la politique publique. Le revenu d’existence répond parfaitement à l’impératif de la dignité humaine. En revanche, les dotations en capital répondent à notre sens à un autre objectif philosophique et politique : l’émancipation de l’individu.


Dès lors, nous proposons de combiner la force des deux mécanismes en un seul, dit « d’égalité des dotations initiales ». Il donnerait dès la naissance des droits socio-économiques à l’individu qui, dans un premier temps, « capitaliserait » chaque mois une part de revenu d’existence sur un compte public personnel et qui, dans un deuxième temps, après délivrance de ce capital d’émancipation (accumulé par conséquent de 0 à 18 ans), donnerait droit à un revenu d’existence mensuel qui permettrait simplement d’assurer la dignité de l’individu au-delà de sa dépendance à la sphère salariale.


Un droit universel, sans contrepartie et individuel


Compris comme un droit à « résonance constitutionnelle », ce mécanisme d’égalité des dotations initiales se veut résolument universel, sans contrepartie, inconditionnel et individuel : il serait un droit de naissance inaliénable comme peuvent l’être par exemple les libertés constitutionnelles.

Par sa seule régularité, le revenu d’existence répondrait certes aux besoins quotidiens et immédiats de chacun. Mais par sa « force de frappe » de départ, un capital d’émancipation donnerait une impulsion essentielle à la construction et à la réalisation d’un projet de vie qui permettrait de mener une existence bien vécue. Une telle dotation délivrerait un capital pour entamer son projet de vie sans l’appui ni la dépendance du secteur bancaire.


L’anticipation psychologique de son versement libérerait les parents de l’horizon de financement des projets – parfois vécu comme impossible – de leurs enfants. Sa visée serait émancipatrice et complémentaire du revenu d’existence, lequel ne serait délivré qu’à partir de 18 ans.


Le montant de la dotation détermine la volonté publique d’assurer l’émancipation des individus. En effet, un montant de 5 000 euros par exemple apparaît moins émancipateur qu’une somme de 64 800 euros, comme nous la préconisons, dont le jeune disposerait dès ses 18 ans − suivant une hypothèse réaliste d’un revenu d’existence de 300 euros par mois capitalisé sur dix-huit ans. Un montant plus faible pourrait certes être facilitateur pour entrer dans la vie d’adulte, mais ne réussirait pas à créer les conditions réelles du démarrage d’un projet émancipateur.


Combiner un revenu d’existence et un capital d’émancipation permettrait aux jeunes d’obtenir les moyens financiers de départ vers l’âge adulte. Ces deux dispositifs ouvriraient la voie à une nouvelle forme de justice sociale véritablement transformatrice (et non seulement réparatrice) des rapports socioéconomiques.


Guillaume Mathelier est l’auteur de L’Egalité des dotations initiales. Vers une nouvelle justice sociale (Georg, 2020).

Guillaume Mathelier(Maire de la commune d’Ambilly/Haute-Savoie) et Alain Policar(Chercheur associé au Centre de recherches politiques de Sciences Po/Cevipof)


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Article paru le 21 Décembre 2020 dans les Echos.fr, signé par Monsieur Julien DAMON (chroniqueur | sociologue, professeur associé à Sciences po) et reproduit avec l'aimable autorisation de l'Auteur.


Demain, un capital de départ pour chaque jeune ?


L'attribution d'une somme substantielle pour chaque jeune au démarrage de sa vie d'adulte revient régulièrement dans le débat.

Elle serait plus efficace qu'une prestation sociale mensuelle pour ses défenseurs. Panorama d'une idée originale qui fait son chemin.


La jeunesse a rarement été autant fragilisée qu'avec cette crise du Covid. Et cela risque de durer tant les conséquences économiques du coronavirus et des confinements successifs semblent s'inscrire dans la durée. N'a-t-il pas été prouvé par des études passées qu'une année scolaire en moins pour une génération, ce sont des salaires moins élevés sur toute une carrière ? Le gouvernement fait donc actuellement feu de tout bois pour limiter la casse : primes à l'embauche, exonérations de charges, accompagnement renforcé. L'ouverture du RSA aux moins de vingt-cinq ans est au coeur des controverses. Parallèlement, l'idée de dotations en capital revient à l'ordre du jour. Elle figure dans la famille des propositions sur le revenu universel, mais sous une autre forme. Plutôt qu'une aide mensuelle, il s'agit d'un capital important accordé aux jeunes lors de leur majorité. Ces programmes ressemblent à une retraite en capital, celle-ci étant servie au début plutôt qu'à la fin de la vie adulte. Au fondement d'une telle proposition réside un principe selon lequel lutte contre la pauvreté et le soutien aux jeunes ne devraient plus passer par la seule assistance des parents ou des jeunes directement mais par la constitution d'un patrimoine.


Refonte intégrale des successions


Les généalogistes de la protection sociale en font remonter l'énoncé à la fin du XVIIIe siècle. Dans un texte rituellement rappelé, sur la « justice agraire », Thomas Paine suggère qu'une somme de 15 livres - de quoi alors acheter une vache et un peu de terrain - soit versée à toute personne arrivant à l'âge de vingt et un ans, afin de faciliter son « commencement dans le monde ». La résolution, repérable ensuite dans des romans de science-fiction, s'étudie rigoureusement depuis le tournant du millénaire. Les juristes américains Bruce Ackerman et Anne Alstott (« The Stakeholder Society », 1999) estiment que tous les jeunes Américains devraient se voir attribuer, à cet âge, une allocation de 80.000 dollars, sans condition de ressources personnelles ou familiales. Sans condition d'utilisation stricte, la dotation pourrait être utilisée afin d'investir dans un logement, des études, des entreprises, des voyages. Cette idée américaine, qui pose bien des problèmes de financement (elle suppose une refonte intégrale des impôts sur les successions) et de mise en oeuvre concrète, ne s'est pas incarnée dans des décisions. Elle a été reprise par les intellectuels proches du New Labour de Tony Blair et traduite dans les faits sous la forme de comptes alimentés dès la naissance. Au début des années 2000, le gouvernement britannique a innové en créant le « child trust fund » (CTF). Les pouvoirs publics ouvraient un compte à la naissance d'un enfant. Le gouvernement y versait une somme équivalente à 350 euros. Tous les enfants étaient éligibles au dispositif, et les plus modestes percevaient des sommes plus importantes..


Le dispositif britannique a été supprimé, mais son principe conserve son intérêt. L'idée de doter chaque nouveau-né d'un capital de départ a d'ailleurs essaimé. On la trouve incarnée ou proposée dans des contextes variés (Canada, Hongrie, Australie, Singapour). Elle s'inscrit dans un courant de pensée sur l'Etat-providence, qui ne doit plus assurer uniquement la redistribution. Il doit permettre la prédistribution. Plutôt que redistribuer a posteriori, il vaut mieux prédistribuer a priori. Avec un fort accent sur l'investissement dans le capital humain, l'orientation consiste aussi à lutter contre les inégalités générationnelles dans les comptes sociaux et contre des inégalités patrimoniales trop prononcées. Parmi les dernières formulations volontaristes en ce sens, exactement dans la logique de certaines philosophies sous-jacentes à ces dotations, Thomas Piketty propose dans son dernier gros volume un puissant mécanisme de circulation du capital et de la propriété. Un impôt à barème très progressif sur le patrimoine, drainant une recette de l'ordre de 5 % du PIB, permettrait de financer une dotation en capital universelle et à montant élevé. Cette dernière, versée à vingt-cinq ans, serait de 120.000 euros.


Changer les perspectives d'avenir


Le débat d'experts traite de nombreuses questions paramétriques sur le financement et l'usage de telles sommes. Pour certains, la seule condition d'éligibilité doit être l'âge. Pour d'autres, le versement doit s'assortir d'un contrôle de l'emploi par les jeunes de leur dotation. Des considérants idéologiques différents, mêlant libéralisme, paternalisme et socialisme, se rejoignent cependant sur le principal intérêt d'une telle opération. Alors qu'une prestation mensuelle pour les jeunes fait évoluer leur consommation et les menus de leurs repas, une dotation substantielle change leurs perspectives d'avenir. 


Politiquement, l'idée revient de plus en plus souvent à l'occasion des campagnes électorales. Cela a été le cas lors des récentes primaires démocrates de l'autre côté de l'Atlantique. En France, le sujet fait l'objet de rapports d'experts mais aussi de formulations précises du côté d'élus. Le député PS Boris Vallaud et la conseillère de Paris LR Marie-Claire Carrère-Gée en suggèrent chacun l'adoption, avec des schémas différents mais des fondements convergents. Bref, le principe de ces dotations en capital progresse. Le projet pourrait prendre toujours davantage de consistance, malgré les redoutables questions de financement et d'orientation qu'il suppose. Rénovant de manière assez vigoureuse les fondements et les objectifs des politiques de redistribution, ces initiatives prêtent naturellement aux débats de fond. Parmi les questions qu'ils soulèvent, il faut savoir si ces fonds doivent seulement compléter ou bien s'ils doivent remplacer les systèmes en place de garantie de ressources et d'assistance. En tout état de cause, des solutions denses et innovantes doivent s'étudier avec toujours plus de sérieux, à mesure du repérage des difficultés accrues de la jeunesse.


50 000 euros de prêts contingents ?


Un puissant effort pour les jeunes peut passer par un capital versé sous forme de prêt. Plus aisée à financer et plus facile à mettre en oeuvre dans des délais raisonnables, l'option s'inscrirait dans la logique des prêts à remboursement contingent. Afin de ne pas débuter dans la vie active par le surendettement, les prêts ne deviendraient remboursables qu'à partir de l'atteinte d'un certain niveau


Alors que des volumes considérables ont été débloqués par le gouvernement pour des prêts garantis par l'Etat (PGE) pour les entreprises, le même mécanisme s'appliquerait aux jeunes. Le système existe déjà pour les étudiants, dans une limite de 15.000 euros. Il serait techniquement simple de l'étendre à tous les 18-25 ans, pour une somme de 50.000 euros. Celle-ci correspond à plus de 7 années de RSA (7 x 12 x 500 euros). Un tel montage ne coûterait pas très cher aux finances publiques puisqu'il repose sur une caution et non sur une allocation. L'opération est audible dans le débat public, avec un instrument représentant un véritable investissement en faveur des jeunes. Le calibrage se discute assurément dans le détail, pour l'éventuel accompagnement des jeunes, le ciblage de leurs projets, les montants déblocables en fonction de l'âge, les conditions de défaut. Tout ceci peut s'argumenter et, surtout, se lancer rapidement avec un réseau bancaire réactif. Le capital versé n'est plus vraiment une dotation. C'est un prêt. Mais il sort des cénacles de la philosophie politique et de la science-fiction, pour arriver vraiment sur les comptes en banque.


Les points clés


Une idée de revenu universel date de la fin du XVIIIe siècle avec « La Justice agraire » de Thomas Paine (1797). « L'Homme aux quarante écus » de Voltaire (1768) est également parfois cité.

Ces propositions, depuis les années 2000, aspirent à réorienter l'Etat-providence vers l'investissement social dans la jeunesse.

Son financement passerait par de profondes réformes sociofiscales, dont un alourdissement de la fiscalité sur les successions et le patrimoine.

Une possibilité : passer par des prêts contingents et garantis par l'Etat.


Julien Damon


Slides projetées à l’occasion d’une présentation 
au Think tank AIRE le 10/04/2019
(Association pour l’Instauration du Revenu d’Existence)


Le QuotidienLe Monde a publié dans son édition du 10/03/19 une tribune proposée par l'Association AICU sur le Capital Universel et son impact potentiel sur la fracture patrimoniale



Malheureusement, notre texte a été revisité par la rédaction qui a supprimé les références au concept d'avances sur Héritages. La version originale est reprise ci-dessous, les paragraphes supprimés ou modifiés par Le Monde étant surlignés en jaune.


Tentatives d'échanges avec Monsieur Thomas PIKETTY


.Cher Thomas Piketty, 

Malgré l’admiration et le respect que nous portons à vos travaux et à votre personne, notre Association ne vous dit pas merci.
Nous constatons que l'une des principales propositions que retiennent les journalistes de votre dernier et brillant ouvrage intitulé "Capitalisme et Idéologie" est la dotation de 120.000 euros que vous proposez d'attribuer à chaque jeune français atteignant l’âge de 25 ans.
Il semblerait que cette somme trouve sa justification dans le raisonnement suivant (page 1130): 
1) Les inégalités patrimoniales sont en France plus importantes encore que les inégalités de revenus.
2) Les économistes s'accordent pour dire que le seuil de pauvreté se situe à 60% du salaire moyen.  
3) En conséquence une dotation "juste" se situe à 60% du patrimoine moyen, ce qui correspond à la somme de 120.000 euros
4) Pour être efficace, cette dotation doit être attribuée au début des parcours de vie, c’est-à-dire à l’âge de 25 ans.

A notre avis, cette approche fait l'impasse sur le fait que, contrairement aux revenus dont les coefficients de variations en fonction de l'âge se limitent aux effets de l'avancement et des évolutions de carrières, les patrimoines dépendent fortement des tranches d'âge. Pour une personne de 25 ans, la somme de 120.000 euros ne représente pas 60% du patrimoine moyen de ses conscrits mais plus vraisemblablement 10 fois cette somme.
Il nous semble que si votre proposition était mise en œuvre en 2020, elle risquerait d’introduire une certaine forme de ségrégation basée sur l’âge. Une nouvelle fracture patrimoniale se formerait, qui séparerait les personnes nées avant et après 1995. Dans la plupart des villages de France on verrait progressivement apparaître des lotissements où les plus jeunes auront fait construire de belles villas implantées sur de grandes parcelles, dominant les logements spartiates du reste de la population. A l'école de ces mêmes villages les enfants des nés-trop-tôt subiront les moqueries condescendantes de leurs camarades mieux logés, mieux véhiculés et mieux habillés.
La dotation que vous présentez comme devant contribuer à réduire les inégalités risque de plus d’être très énergiquement combattue par les décideurs et leaders d’opinion qui, dans les médias comme dans les partis politiques et les institutions, sont très majoritairement installés du côté confortable de la fracture patrimoniale : il est probable que le simple fait de proposer un mode financement potentiellement attentatoire au plus important et au plus discret de leurs privilèges serait de nature à reléguer pour de longues années le concept de Capital Universel dans le tiroir des utopies sympathiques, un tiroir dans lequel il voisinerait avec l’idée du Revenu universel d’existence, trop hâtivement présentée lors de la campagne électorale de 2017 pour que les français puissent comprendre son intérêt et sa faisabilité. 
Notre Association tient aujourd’hui pour acquis les points suivants :
1. Le concept de Capital Universel recèle un potentiel évolutionnaire suffisamment important pour mériter une place dans le débat public.
2. Attribuer ce capital universel à une seule tranche d’âge (800.000 personnes) risquerait de créer de nouvelles frustrations dans une population qui en ressent déjà trop.
3. Le financement par l’impôt est mal adapté au cas très particulier du Capital Universel.
4. Il vaut mieux procéder par avances d’hoiries, comme le propose par Bernard Berteloot : il s’agit de confier à chaque bénéficiaire une somme significative qui sera déduite, inflation comprise, des héritages ou donations qu’il sera susceptible de recevoir ou de léguer par la suite. En cas de décès d’un bénéficiaire qui n’aurait ni reçu ni légué d’héritage significatif, la caution de l’Etat sera appelée et la dette d’honneur sera effacée.
5. Le dispositif pourrait être porté par une caisse intergénérationnelle de solidarité qui serait abondée par les gestionnaires de fonds pour comptes de tiers (hedge funds, asset managers, banques d’affaires, family offices). S’agissant d’un jeu d’écritures à somme nulle puis auto-alimenté sur une période longue (60 ans) ces gestionnaires de fonds trouveront dans ce dispositif les moyens de sécuriser une toute petite partie des fonds qu’ils manipulent : une créance sur le patrimoine d’un individu garantie en premier rang par un acte notarié et cautionné in fine par l’Etat sera plus solide qu’une créance directe sur l’Etat, surtout lorsque ce dernier est très endetté. Il s’agit peut-être là d’un excellent moyen de protéger les acteurs de la haute finance contre leurs propres turpitudes…
6. Permettre aux jeunes d’entrer dans la carrière sans devoir attendre que leurs anciens n’y soient plus est une étape intéressante mais insuffisante. Il conviendra de compléter l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme, par exemple sous cette forme : « Chaque citoyen âgé d’au moins 25 ans a droit à une avance d’hoirie en euros égale à mille fois la différence entre le chiffre 85 et son âge, déduction faite des legs antérieurs. Cette avance fera l’objet d’un acte notarié et sera actualisée puis restituée à la collectivité à mesure et dans la limite des héritages reçus ou, à défaut, légués par chaque bénéficiaire. En l’absence de restitution, la caution de l’État sera appelée et la créance sera annulée ». Pour mémoire, cet élargissement du nombre de bénéficiaires potentiels avec modulation des dotations en fonction des espérances de vie statistiques résiduelles aboutirait, dans l’hypothèse où tous les bénéficiaires potentiels la réclameraient, à une mise en circulation d’argent (« sang de la vie sociale ») d’environ 1200 Md€ pour la France. Incompatible donc avec un financement par l’impôt mais en phase avec les préoccupations des gestionnaires de fonds pour compte de tiers qui cherchent à sécuriser à tout prix les actifs qu’ils gèrent, le problème de la liquidité pouvant dans ce cas être résolu par des transactions sur les part de la caisse portant l’opération.
7. Il est particulièrement difficile d’introduire ce type de propositions d’innovation économique et sociale dans le débat public. A titre d’illustration de cette difficulté, sachez qu’une contribution proposée par votre serviteur a été publiée sur la même double page du quotidien Le monde daté des 10 et 11 Mars 2019 que votre tribune intitulée « aimer l’Europe, c’est la changer ». Malheureusement les contraintes de mise en page ont fait que les références au concept d’avance d’hoirie / avance sur héritage ainsi que la proposition portant sur l’article 17bis de la déclaration des droits de l’homme (paragraphe en italique ci-dessus) ont été supprimées par la rédaction. 
 
Nous sommes évidemment disposés à et désireux d’échanger avec vous-même ou avec vos équipes sur ces sujets. 
Nous nous efforçons d’obtenir des courbes de Lorenz de la répartition des patrimoines actualisées et surtout détaillées par déciles représentatifs des tranches d’âges. Ces courbes nous permettraient d’étayer l’argumentaire que nous nous efforçons de construire en faveur du Capital Universel. L’élaboration de ces documents par l’une des équipes universitaires que vous dirigez vous parait-elle envisageable?

Dans l’attente d’un prochain contact, nous vous assurons, Monsieur le Professeur, de notre très sincère et respectueuse considération.
 
Pour l’Association Intergénérations pour le Capital Universel ( www.aicu.fr )
 
Denis Consigny, Président dc@aicu.fr

Ce courrier a été adressé à Monsieur  Piketty  le 4 Novembre 2019 par l'intermédiaire de la rédaction du Journal Le Monde. Pour l'instant, ni Monsieur Piketty ni ses collaborateurs n'ont souhaité (ou n'ont eu le temps) d'y répondre….

Texte mis en ligne le 6 février 2020

Encore un effort, Monsieur GRIVEAUX!


Cher Benjamin Griveaux,

Votre proposition d'attribuer une aide pouvant atteindre 100.000 Euros aux jeunes désirant acquérir un premier logement dans la Capitale dont vous briguez la mairie alimente le débat de la campagne municipale.

Elle montre que vous faites partie du petit nombre de responsables politiques qui ont compris que les inégalités patrimoniales étaient plus importantes, plus injustes et probablement plus faciles à résorber que les inégalités de revenus.

Mais il est à craindre que, tel que vous le présentez, ce coup de pouce aux acquéreurs sera essentiellement capté par les vendeurs et se traduira, à l'instar des APL pour les locations et des baisses de taux de crédits pour les acquisitions, par une nouvelle flambées des prix des petites et moyennes surfaces. 

D'autre part, le concept de propriété privée à abusus limité par une dette vis à vis d'une collectivité parait difficilement compatible avec nos actuelles règles de droit.

Nous aimerions pouvoir vous expliquer comment et pourquoi le fait de confier un Capital Universel aux parisiens qui en feront la demande, par exemple dans le cadre de ce que nous appelons l'article 17 bis de la déclaration des droits de l'Homme, serait une stratégie économiquement, socialement et juridiquement plus robuste et efficiente que celle que vous proposez. 

Les membres du bureau de notre Association se tiennent à votre disposition et à celle de vos équipes pour échanger sur ces sujets.

Bien sincèrement et respectueusement,
 
Pour l’Association Intergénérations pour le Capital Universel    ( www.aicu.fr )
 
Denis Consigny, Président dc@aicu.fr

Texte mis en ligne le 6 Février 2020